Trois générations. Mon arrière-grand-mère, ma grand-mère et ma mère. Paysanne à la campagne, femme de ménage en ville et ouvrière à l’usine. Trois femmes aux métiers socialement utiles, mais peu considérés et mal rémunérés. Leur vécu est à la source de mes questionnements et cheminements artistiques sur le domestique, l’intime et sur les liens qu’ils tissent avec le corps des femmes.
Les activités dites « domestiques », attribuées par défaut aux femmes, le sont non seulement au sein du foyer familial, mais aussi en dehors. Elles ont de tout temps été dévalorisées, invisibilisées, effacées, et avec elles les femmes qui les exercent. Un effacement qui dans mon travail fait également écho à cette phrase, reprise et scandée dans les manifestations féministes mexicaines de 2019, « Ils ont voulu nous enterrer, ils ne savaient pas que nous étions des graines ».
De là sont nées des images, des matières. Au cœur de l’installation, les différents matériaux et supports utilisés évoquent un quotidien propre au domestique et au foyer : du linge, du fil, des aiguilles, des feuilles séchées utilisées en cuisine, … auxquels sont mêlés des éléments traditionnellement associés au féminin : la terre, les plantes, la nature. Dessins aériens et aquarelles diaphanes révèlent des corps féminins hybrides, qui éclosent, enfouissent leurs racines, s’épanouissent, se transforment. Sur ces corps, des cicatrices, marques de réparation et de résilience. De ces corps, des métamorphoses végétales prodigieuses, symbole de la capacité d’adaptation, de régénération, de force et de renaissance.
Valérie Vial, novembre 2022